Requalification de CDD en CDI dans le sport professionnel : retour sur l’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 19 juin 2025

Le 19 juin 2025, la Cour d’appel de Paris a rendu un arrêt dans une affaire opposant le joueur Adrien Rabiot au club du Paris Saint-Germain.

Dans son arrêt, la Cour a ordonné la requalification des contrats à durée déterminée (CDD) successifs du en contrat à durée indéterminée (CDI). Cette décision amène à revenir sur les conditions permettant de conclure un CDD en matière sportive.

Il doit être observé que le premier contrat avait été conclu en 2014 et n’était donc pas soumis aux dispositions transitoires de la loi du 27 novembre 2015 consacrant le CDD spécifique, mais au droit commun du travail.

Or, pour recourir au CDD d’usage, il doit être établi que l’emploi du joueur a un caractère temporaire.

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Les faits

Pour rappel, le Joueur avait été engagé en 2010 par le Club, d’abord comme aspirant puis comme apprenti, avant de signer successivement plusieurs CDD en qualité de joueur professionnel. En octobre 2014, un avenant au contrat a été signé pour prolonger la relation contractuelle jusqu’en 2019.

À la suite de sanctions disciplinaires et du non-versement d’une prime d’éthique, le joueur a saisi le Conseil de prud’hommes de Paris, demandant notamment la requalification de ses CDD en CDI. Débouté en première instance en 2021, il a interjeté appel. La Cour d’appel de Paris a finalement rendu une décision en sa faveur.

En défense, le Club invoquait l’application du CDD spécifique (articles L. 222-2-1 et suivants du Code du sport, introduits par la loi du 27 novembre 2015)).

Or, l’avenant litigieux de 2014 ayant été conclu avant l’entrée en vigueur de cette réforme, il était régi par le droit commun du travail.

La Cour rappelle que le recours aux CDD d’usage, autorisé dans le secteur sportif, demeure subordonné à la démonstration du caractère temporaire de l’emploi. Le PSG n’a pas apporté la preuve de circonstances concrètes justifiant une telle succession de contrats à durée déterminée.

La Cour retient que les fonctions du joueur étaient identiques pendant neuf années consécutives, sans interruption ni variation de nature. Elle considère donc que ces contrats visaient à pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente du club.

En conséquence, la Cour requalifie la relation contractuelle en CDI à compter du 1er juillet 2012, ouvrant droit à une série de rappels de salaires, d’indemnités et de dommages-intérêts au bénéfice du joueur.

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Enjeux pour les clubs et les acteurs du sport professionnel

Cette affaire illustre la fragilité juridique de l’usage prolongé des CDD, même dans le cadre sportif. Elle pose la question de la compatibilité du CDD spécifique prévu par le droit français avec les exigences européennes, notamment la Directive 1999/70/CE, qui impose aux États membres de prévenir les abus liés à l’usage de contrats à durée déterminée successifs.

Cette jurisprudence pourrait inciter d’autres sportifs professionnels à contester leurs contrats devant les juridictions prud’homales. Il appartient donc aux clubs et employeurs du secteur sportif de sécuriser juridiquement leurs contrats.

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Sur la suppression de la prime d’éthique

En parallèle, la Cour a sanctionné la suppression de la prime d’éthique du Joueur, considérant qu’il s’agissait en l’espèce d’une sanction pécuniaire déguisée, interdite par l’article L. 1331-2 du Code du travail.

De plus, la mise à pied disciplinaire fondée sur les mêmes faits a été annulée, au motif qu’un salarié ne peut être sanctionné deux fois pour un même agissement.

Le PSG a donc été condamné sur ce terrain également.

Au total, le PSG a été condamné à verser à Adrien Rabiot une somme de plus d’un million d’euros comprenant :

  • les indemnités de requalification,
  • les rappels de salaires,
  • les dommages-intérêts pour sanctions irrégulières.

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Cette décision invite les acteurs du football à une grande prudence dans la rédaction et le renouvellement des contrats de travail des joueurs et des entraineurs.

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